<<Travailleur détaché >> : qu’est ce que c’est ?

Le président de la République a entamé mercredi 23 août une tournée en Autriche, en Roumanie et en Bulgarie, afin de promouvoir un durcissement de la circulaire sur les travailleurs détachés en Europe. Régis par une directive datée de 1996, les travailleurs détachés demeurent un sujet de controverses, dont la pratique est entachée de multiples irrégularités.

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Dans le cadre d’une mini-tournée de trois jours en Europe orientale (Autriche, Roumanie, Bulgarie), Emmanuel Macron a rouvert le débat autour de la règle du travail détaché dont l’application est sujette à des tensions récurrentes sur le continent.

En visite à Salzbourg, en Autriche, le président français, partisan d’un durcissement de la directive européenne de 1996 qui encadre cette question, a même évoqué une « trahison de l’esprit européen dans ses fondamentaux ».

► Qu’est-ce qu’un travailleur détaché ?

Il s’agit d’un ressortissant de l’Union européenne, envoyé par son entreprise dans un autre des États membres pour une « mission temporaire », de deux ans maximum. En vertu de la directive de 1996, il est soumis à la réglementation du pays d’accueil en termes de droits sociaux et de conditions de travail (salaire minimum, temps de travail maximum, congés payés, etc.) mais continue de payer les cotisations sociales dans son pays d’origine.

La France est le deuxième pays d’accueil derrière l’Allemagne, avec 286 000 salariés détachés déclarés en 2015 (+ 25 % sur un an) selon le ministère du travail, en provenance de Pologne (46 800) ou de Roumanie (30 000) notamment. Au total, l’Union européenne en compte un million, principalement dans le secteur du bâtiment-travaux publics (BTP), de l’industrie ou de l’agriculture.

Mais l’Hexagone est aussi le troisième pays d’envoi, derrière la Pologne et l’Allemagne. La France comptabilise « près de 200 000 » travailleurs détachés, essentiellement en Belgique, Allemagne ou Espagne, selon un rapport de la Commission nationale de lutte contre le travail illégal, publié en 2015.

► Quels problèmes ce statut pose-t-il ?

Les principes liés au détachement, contenus dans la directive, font régulièrement l’objet de détournements. Ils ont été soulignés par exemple par la polémique entourant le chantier de l’EPR de Flamanville : non-déclaration, rémunérations très inférieures au smic, dépassement des durées maximales de travail, hébergement indigne, etc.

Selon un rapport sénatorial de 2013, la fraude concernait à l’époque entre 220 000 et 300 000 travailleurs détachés illégalement en France. Ces fraudes engendrent une concurrence déloyale envers les entreprises respectant la loi.

Le travail détaché est aussi régulièrement accusé d’être un terrain favorable à l’augmentation du dumping social et de mettre en concurrence les travailleurs européens avec une main-d’œuvre à très bas coût. En 2016, l’Union note ainsi des écarts importants entre les coûts horaires de main-d’œuvre de ses membres, allant de 4,4 € à 42,0 € selon Eurostat. Les plus faibles sont constatés en Bulgarie (4,4 €) et en Roumanie (5,5 €) alors que la France (35,6 €) est bien au-dessus de la moyenne des États membres (25,4 €).

► Comment lutte-t-on contre ces fraudes en France ?

L’amende maximale pour fraude au détachement a été portée de 10 000 € à 500 000 €, à raison de 2 000 € par salarié détaché et de 4 000 € en cas de récidive. Les contrôles, passés en moyenne de 500 à 1 500 par mois, avaient débouché, à fin mars 2017, sur 33 suspensions de chantiers et 5,4 millions d’euros d’amendes. Les lois ont aussi responsabilisé les donneurs d’ordres, qui sont désormais solidaires de leurs sous-traitants en cas de non-versement des salaires par exemple. Dans le bâtiment, la précédente majorité a lancé une nouvelle carte d’identification professionnelle, qui doit être déployée d’ici à fin septembre. Obligatoire sur les chantiers, elle doit faciliter les contrôles de l’inspection du travail.

Récemment, la clause molière, qui impose l’utilisation du français sur les chantiers publics, continue toujours de faire réagir, alors que le précédent gouvernement l’avait déclaré illégale mais que certains exécutifs locaux y sont favorables.

► Qu’est-ce qui est envisagé au niveau européen ?

« Salaire minimum de référence », « renforcement des contrôles », « création d’une Agence européenne de contrôle du travail mobile en Europe » ou « d’une carte électronique du travailleur européen », les propositions n’ont pas manqué sur le sujet ces dernières années.

Un récent projet de révision de la directive de 1996 a été débattu en 2016, porté par la France, l’Allemagne et la Belgique. Il visait notamment à instaurer le principe du « travail égal, salaire égal », qui devait comprendre « les taux de salaire minimal, mais aussi d’autres éléments, tels que les primes ou les indemnités ». Il fut finalement rejeté par une dizaine de pays, principalement de l’Est de l’Europe, qui dénoncent des velléités protectionnistes.

Emmanuel Macron avait fait du « durcissement de la directive sur les travailleurs détac